La recherche en génomique : un investissement précieux pour la surveillance de la COVID-19

- Ottawa, ON

Séquençage par nanopore (ASPC)

De nouvelles méthodes mises au point par les chercheurs de l'Agence de la santé publique du Canada (ASPC) pour détecter et caractériser plus rapidement les agents pathogènes dangereux donnent aux autorités canadiennes de santé publique une meilleure capacité de riposte à la COVID-19.

Pour suivre la progression des agents pathogènes, les épidémiologistes doivent pouvoir caractériser des échantillons de ces agents pour comparer les lignées de séquences génomiques recueillies à différents endroits. En remontant à la source des agents pathogènes, il est plus facile d'appliquer des mesures pour limiter leur propagation. Grâce à la génomique, on peut suivre l'évolution des virus pour s'assurer que les vaccins demeurent efficaces et que les antiviraux réagissent encore bien, et surtout, voir si des mutations qui présentent une plus grande transmissibilité ou de nouveaux variants préoccupants font surface.

Réorienter la recherche

Financé par l'Initiative de recherche et développement en génomique (IRDG) du gouvernement du Canada, le projet de recherche, lancé par l'ASPC en 2019, vise à établir des protocoles pour accélérer la caractérisation de différents agents pathogènes au moyen de la technologie de séquençage par nanopore. L'éclosion de la pandémie dans les premiers mois de 2020 a recentré toute la recherche en cours sur l'application de cette nouvelle technologie afin d'accélérer la compréhension du virus responsable du SRAS-CoV-2 à l'origine de la COVID.

Le séquençage par nanopore : un bond quantique

Selon la chercheuse Anna Majer (Ph. D.) qui dirige le projet au Laboratoire national de microbiologie de l'ASPC à Winnipeg (LNM), cette technologie de génomique dite de troisième génération offre de multiples avantages, dont celui de fournir les résultats plus rapidement et à moindre coût en éliminant une grande partie du travail manuel qui devait auparavant être effectué par des techniciens hautement qualifiés.

« Avec les technologies précédentes, il fallait jusqu'à une journée complète, voire davantage pour préparer un échantillon et plusieurs heures ensuite pour compléter le séquençage avant de pouvoir analyser les données du génome. La technologie par nanopore simplifie considérablement la préparation des échantillons si bien que le séquençage peut s'amorcer en moins d'une heure. Et par-dessus le marché, les données sont obtenues en temps réel, soit quelques minutes après le début du séquençage. On obtient ainsi l'information recherchée pour déterminer ce que contient l'échantillon », explique Mme Majer.

Le défi de la COVID

Aussi intéressante et efficace soit-elle, il a fallu beaucoup de travail en amont pour parvenir à inclure la technologie de séquençage par nanopore dans l'arsenal de lutte contre la COVID.

« Comme partout ailleurs dans le monde, nous partions pratiquement de zéro dans l'étude du virus, poursuit Mme Majer. Contrairement aux agents pathogènes connus que nous avions déjà étudiés, il n'existait aucun protocole validé pour séquencer le virus et très peu de données pour orienter nos recherches. Personne ne travaillait encore sur ce virus. Ce que nous avions appris grâce au projet de l'IRDG nous a toutefois donné une longueur d'avance, soit des connaissances que nous pouvions appliquer pour comprendre la COVID. »

Grâce à ses travaux et à ceux d'autres chercheurs au Canada et ailleurs dans le monde, l'équipe de Mme Majer a établi un protocole fiable pour extraire un fragment d'ADN d'un spécimen de coronavirus et le préparer pour le séquençage par nanopore. Pour pouvoir interpréter les données sur le génome obtenues, l'équipe de bio-informatique du LNM a développé une plateforme automatisée pour analyser les données et caractériser les échantillons de SRAS-CoV-2 en provenance de différents laboratoires de santé publique provinciaux et territoriaux.

Un transfert de connaissances effectué à point nommé

Au début de l'été 2020, l'équipe de l'ASPC disposait d'un protocole éprouvé pour séquencer le virus de la COVID au moyen de la technologie par nanopore ainsi que de la plateforme bio-informatique nécessaire pour caractériser le virus. Les connaissances et les outils étaient passés aux laboratoires de santé publique de toutes les régions grâce au Réseau des laboratoires de santé publique du Canada.

Ryan McDonald, chercheur clinique associé au laboratoire des autorités sanitaires de la Saskatchewan à Regina raconte que les travaux effectués par l'équipe d'Anna Majer avaient permis à son laboratoire de travailler avec la technologie de séquençage par nanopore beaucoup plus tôt que cela aurait été possible autrement.

« À l'automne 2020, Génome Canada a octroyé du financement aux laboratoires de santé publique du pays pour leur permettre de faire l'acquisition d'une technologie de séquençage du génome. Nous avons acquis la technologie par nanopore au printemps 2021 et elle était opérationnelle dès juillet. Grâce au protocole de séquençage du SRAS-CoV-2 mis au point par l'équipe de Mme Majer, nous avons pu utiliser la nouvelle technologie pratiquement sur-le-champ. Nous nous sommes ainsi épargné des semaines à dépouiller la littérature scientifique afin de concevoir un protocole de toute pièce », d'affirmer Ryan McDonald.

Le travail se poursuit

Tant que le virus de la COVID continuera de muter et que de nouveaux variants verront le jour, Mme Majer et son équipe au laboratoire de l'ASPC continueront de perfectionner et de mettre à niveau les protocoles existants, et de diffuser les nouvelles connaissances en continu à travers le Réseau des laboratoires de la santé publique.